Artiste/Fabricant(e) Inconnu
Date de production/création
Vers 1950-1960
Entrée dans la collection du musée
1990
Lieu d’origine
Inconnu
Lieu actuel
National Museum of the Romanian Peasant, Bucharest, Romania
Matériau
Plâtre, teinture/vernis
Dimension
61 x 34 x 32 cm (Lénine gris) ; 52 x 24 x 21 cm (Lénine rouge)
Numéro d'inventaire C.Sc-0001, C.Sc-0002
Mot-clé Patrimoine culturel Memoire Déchet
Droits d'auteurs
Statut En réserve
Crédits des images Copyright NMRP
Culte de la personnalité, kitsch et oubli : les bustes du musée Lénine-Staline, qui se situait à Bucarest.
Que nous dit cet objet ? De quelles vies témoigne-t-il ?
What is this object about, who are the people behind it ? (100 words) Les deux bustes témoignent du culte de la personnalité de Lénine, qui a vu le jour en URSS et s’est répandu dans tout le bloc de l’Europe de l’Est après la mise en place des régimes socialistes d’État. Ils illustrent la valeur muséale des objets au fil du temps. Ces deux bustes proviennent du musée Lénine-Staline fondé entre 1951 et 1955 à Bucarest en tant qu’antenne du musée central Lénine à Moscou, et qui resta ouvert sous différentes dénominations jusqu’en 1990. Même si des sculptures de ce type ont été produites localement après 1945, il est très probable que ces bustes aient été importés d’URSS dans les années 1950. L’histoire du musée sur le thème de l’URSS fait actuellement l’objet de recherches.
À quels lieux cet objet est-il rattaché ? Quelle est sa dimension européenne/transnationale ?
Ces deux bustes évoquent les relations de la Roumanie, et de l’ensemble du bloc de l’Est, avec l’URSS, qui fut la puissance hégémonique en Europe centrale et orientale après 1945. Par ailleurs, le musée central Lénine de Moscou possédait plusieurs antennes dans différents pays du bloc de l’Est, qui ont toutes largement reproduit le modèle du musée central. La destruction des statues des dirigeants communistes après les révolutions anticommunistes de 1989 dans tout le bloc de l’Est place les deux bustes dans le contexte de la désacralisation des figures communistes, de la démolition des statues jusqu’à leur revalorisation comme l’ont fait le parc Grūtas ou le parc Memento.
Comment et pourquoi cet objet a-t-il intégré les collections du musée ?
En 1990, le Musée du Paysan Roumain, qui vient d’être créé, hérite du bâtiment et d’une bonne partie des collections du musée du parti, qu’il donne ou dont il se débarrasse. Plus tard, il fut découvert que le sous-sol abritait une réserve supplémentaire où des objets de l’ancien musée soviétique avaient été déplacés dans la seconde moitié des années 1960. Les deux bustes proviennent très probablement des expositions du musée qui ont été « cachées » dans le dépôt lorsque la Roumanie a pris ses distances par rapport à l’hégémonie soviétique pendant la période communiste et qu’elle s’est donc donné une nouvelle orientation culturelle et idéologique nationaliste. Les figures emblématiques du communisme soviétique ont ainsi été remplacées par de nouveaux mythes nationaux dans lesquels se confondirent le parti communiste roumain et l’État national.
Quel est le lien entre cet objet et les déchets ?
L’association de ces œuvres avec les déchets revêt de multiples facettes, à savoir que les deux bustes ont été remisés après la réorientation nationaliste du régime de Bucarest. D’autre part, après 1990, les objets exposés dans le nouveau Musée du paysan roumain ont progressivement obéi à des critères esthétiques proprement artistiques. Ils ont donc été doublement dévalués, d’abord en tant que reproduction d’un original puis en raison de leur appartenance au réalisme socialiste dans l’art. Le buste rouge a été mis en valeur dans l’exposition « La peste », où il a été sorti du champ de la production de masse par sa modification et sa transformation implicite en un objet kitsch, lui-même en lien avec la manipulation des émotions. Il a ensuite été oublié, à l’instar du buste gris.